Quand José Mourinho était protagoniste : le grand Porto 2003-2004 (épisode final)

Épisode final : des basses besognes à la démonstration tactique

En 2003-2004, la prestigieuse Ligue des champions semble inaccessible pour les clubs portugais, attirant les regards vers l’Italie, l’Angleterre et l’Espagne, où des équipes étoilées luttent pour la conquérir. Durant la saison précédente, l’A.C. Milan a dû batailler jusqu’à un tir au but pour triompher de la Juventus. Pourtant, si cette compétition avait jeté un œil vers le Portugal, elle aurait pu apercevoir le FC Porto dirigé par Mourinho, remportant la Coupe de l’UEFA, annonçant ainsi une émergence au niveau européen et mondial. La saison 2003-2004 et l’incroyable parcours du FC Porto sous la houlette de José Mourinho en Ligue des champions vont faire éclore au grand jour le talent indéniable de cet entraîneur. Dans l’effervescence du football, l’histoire et le passé semblent souvent oubliés. Au-delà des élans de nostalgie des supporters déçus, la réputation des entraîneurs se façonne et s’effondre au gré des matchs. C’est pourquoi Beautyfootball prend le temps d’explorer ce premier succès retentissant de José Mourinho avec son FC Porto, construit méticuleusement, dont le style de jeu semble à mille lieues des clichés associés à ce coach aujourd’hui. Des dragons aux lions, comment Mourinho a-t-il surmonté les derniers obstacles avant de décrocher le titre suprême ?

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Note au lecteur : Puisque nous analysons des matchs anciens, la qualité des vidéos et donc des images choisies peut parfois laisser à désirer. Merci de votre compréhension. Un grand merci à footballia.net, sans qui cette analyse n’aurait pas été possible.

S’arracher en Galice : une demi-finale contre La Corogne sous tension

Composition et animation

Entre le match aller et le match retour, José Mourinho reste fidèle à son 4-4-2 en diamant. Il remet Derlei dans le onze de départ pour le match retour après avoir raté une grande partie de la campagne en Ligue des champions. Dans les changements entre les deux matchs, Alenitchev est remplacé par Pedro Mendes, deux joueurs vitaux pour Mourinho grâce à leur polyvalence.

L’adversaire

Javier Irureta dirige une équipe semblable à celle de José Mourinho, avec de grands talents tels que Valeron, Mauro Silva et Pandiani, mais sans les étoiles. Durant les rencontres aller et retour, il doit apporter des changements notables : Mauro Silva suspendu et remplacé par Duscher, et J. Andrade, expulsé au match aller, est remplacé par César. Pour le reste, il adopte un 4-2-3-1 classique.

Le protagonisme de José Mourinho au secours de la double confrontation fermée

Pour le FC Porto de Mourinho et le Deportivo La Corogne d’Irureta, atteindre les demi-finales de la Ligue des champions était inattendu. Ce choc garantit à l’un de ces deux outsiders une place en finale de la plus prestigieuse des compétitions européennes, amplifiant ainsi la pression ressentie sur le terrain pendant la première mi-temps du match aller.

Les initiatives offensives sont quasiment inexistantes : le FC Porto fait circuler le ballon latéralement, cherchant un jeu long autour de Mac Carthy, qui provoque une bataille acharnée pour les secondes balles. Le niveau technique est inquiétant pour une rencontre de cette envergure : même Deco commet des erreurs dans ses contrôles et passes au cours de cette première moitié. Les sorties de balle sont désastreuses. Au gré de ces 45 premières minutes, une véritable « guerre aérienne » s’installe et les attaquants expriment leur frustration face à cette situation ; le salut viendra du jeu au sol, comme le démontrent Carlos Alberto et Pandiani.

Défensivement, les joueurs semblent peiner à contrôler leurs émotions. Les fautes inutiles sont nombreuses, rendant le jeu haché des deux côtés. Dans un schéma classique, les deux blocs s’organisent avec discipline et annulent toutes velléités offensives : une tentative d’un joueur en première ligne suffit à provoquer l’affolement chez le porteur de balle, qui se précipite. Ce match rappelle à quel point la possession de balle peut être trompeuse hors contexte. Ainsi, Porto contrôle le ballon à 62% contre 38%, mais presque toutes leurs séquences en sont stériles.

Le public portugais, averti, constate bien que l’animation habituelle de son équipe, surtout à domicile, est absente.

José Mourinho apparaît également très insatisfait de la performance de ses joueurs durant le premier acte. Il effectue deux changements dès le début de la seconde mi-temps : Costinha et Alenitchev sont remplacés par Pedro Mendes et Jankauskas. C’est la première fois de la compétition que le coach portugais effectue des modifications aussi notables dans l’animation de son équipe. Le 4-4-2 diamant est alors remplacé par un 4-2-2-2, un schéma jamais employé en Ligue des champions jusqu’alors :

Le 4-2-2-2 se distingue clairement ici, permettant une densité de joueurs dans l’axe, multipliant les relais pour un jeu court, tandis que les couloirs sont laissés ouverts pour les projections, surtout celles des latéraux comme Ferreira sur l’image.

Les conséquences sur l’animation du collectif portugais sont immédiates et bénéfiques : Deco et Carlos Alberto commencent à jouer entre les lignes, tandis que Jankauskas et Mac Carthy apportent une présence dissuasive à la défense adverse. Parallèlement, Maniche et Pedro Mendes se coordonnent, permettant ainsi de créer des supériorités numériques. Avec des options renforcées dans le cœur du jeu, les passes deviennent plus rapides et les combinaisons plus percutantes. Les sorties de balle en attestent :

La première ligne défensive du Deportivo est mise à mal suite à l’ajustement tactique de José Mourinho : la zone derrière Pandiani est désormais occupée par deux joueurs, Maniche et Pedro Mendes, capables de se passer le ballon et de se projeter dans le terrain adverse, poussant les deux ailiers du 4-2-3-1 à se regrouper, offrant ainsi plus d’espace sur les côtés pour Ferreira et N. Valente.

Les attaques organisées deviennent également menaçantes, flirtant avec la réussite :

Carlos Alberto, en position, a un léger temps d’avance : il peut servir Jankauskas au sol qui lance une combinaison.

Jankauskas décale Mac Carthy, qui, avec intuition, laisse le ballon passer derrière lui pour Maniche qui s’illustre. Mac Carthy a géré la pression de deux adversaires et cela témoigne de l’harmonie au sein de ce collectif où les joueurs se trouvent sans se regarder.

Maniche dispose de quelques secondes et quelques mètres devant lui : suffisamment pour tirer, sa tentative sur la barre témoigne de cette qualité d’attaque.

En phase défensive également, le protagonisme de l’équipe de Mourinho améliore la prestation collective. Le FC Porto semble moins craintif à l’idée de défendre en avançant, et les effets sont positifs :

Les deux attaquants portugais pressent les défenseurs centraux adverses, créant du temps et de l’espace.

Bien que ceux-ci tentent de relancer court, cela permet à la deuxième ligne portugaise d’intensifier la pression au cœur du jeu, où un 4 contre 3 est visible à l’image.

Le ballon est récupéré grâce à une belle projection sur le temps de passe. Une transition se profile avec des coéquipiers en capacité de se projeter.

Une occasion franche découle de cette passe de Deco pour Maniche. Le défenseur adverse doit gérer Maniche face à lui et Mac Carthy à quelques mètres, prêt à faire un appel. Cependant, un mauvais choix de l’attaquant ne permettra pas de conclure cette occasion.

Avec ces changements, José Mourinho et ses joueurs se mettent dans de meilleures positions pour aller chercher un résultat favorable à domicile après le match aller. Malheureusement, la défense de Deportivo La Corogne s’est montrée impeccable, et le score final se conclut sur un 0-0. Mourinho saura-t-il poursuivre son approche proactive lors du match retour ?

Début de la rencontre hostile au Riazor

Le FC Porto démarre le match en terrain difficile, mais paradoxalement, il reste fidèle à son modèle de jeu initial. Une anomalie, car les matchs à l’extérieur sous Mourinho ont souvent été moins attrayants à cet égard.

Dans la séquence suivante, plusieurs principes de jeu, essentiels pour l’entraîneur portugais, se révèlent durant la saison :

Ricardo Carvalho gère le ballon sous la pression de l’attaquant espagnol.

Carvalho prend l’initiative de fixer deux joueurs avant de servir une passe verticale, risquée mais pertinente, vers un attaquant ou un milieu de soutien. Au match aller, aucun défenseur n’avait affiché de telles intentions.

La passe de Carvalho traverse le bloc adverse et touche Derlei en pleine course, qui joue rapidement vers Pedro Mendes, prêt à se projeter.

Les sorties de balle sont effectuées avec sérénité, le jeu de soutien autour des attaquants, et les milieux se projettent ; le FC Porto s’en retourne à ses fondamentaux qui lui ont permis d’aller bien loin dans cette compétition.

En défense, le FC Porto alterne entre pressing et défense placée, maitrise tout. Malgré des moments de faiblesse, comme à la fin de la première mi-temps où La Corogne insiste, la maîtrise de l’événement est palpable chez les Lusitaniens.

Lorsque quatre joueurs sont en avant de la ligne de pression, Deco perd malheureusement le ballon face à une double pression de Corogne.

Pendant ce temps, alors que les joueurs offensifs se replient pour couper les solutions de passe potentielles, Maniche prend le rythme de la défense et va harceler Manuel Pablo. Au lieu d’attendre ses coéquipiers plus bas, Maniche fait confiance aux qualités de compensation de ses coéquipiers, notamment Costinha, crucial dans ce rôle, et choisit de défendre en avançant. Récupérer le ballon dans ces circonstances pourrait offrir une belle opportunité.

Manuel Pablo, prudent face à la montée défensive de Maniche et au repli des Portugais, choisit de dégager le ballon. Ce résultat roule dans les pieds des défenseurs de Porto, libérant une chance d’attaque.

À l’approche de la fin du temps réglementaire, les offensives rapides se multiplient pour les Portugais.

La Corogne cherche à pénétrer le cœur du bloc portugais. Malheureusement pour eux, Pedro Mendes, nouvellement entré, intercepte le ballon.

Aussitôt, Pedro Mendes alimente Maniche, qui bénéficie d’un temps et d’un espace considérables.

Un ballon de passe bien ajusté vers Derlei, en pleine course, met la défense de La Corogne sur les rotules. Un retour exceptionnel de César évite à Derlei de se retrouver en un contre un face à Molina.

C’est sur l’une de ces actions que l’égalisation se casse. C’est un éclair de génie de Deco qui ouvre le score.

Un long jeu, mal anticipé par la défense centrale, les oblige à dégager en catastrophe.

Ce ballon mal dégagé se retrouve deux secondes plus tard aux pieds de Deco. Cette transition lui permettra de démontrer toute l’étendue de son talent.

Deco fixe trois joueurs : un crochet bien placé suffit à éliminer ses adversaires et à l’emmener dans la surface.

Les qualités individuelles de Deco font la différence : grâce à sa conduite de balle, sa vitesse et sa maîtrise de l’espace, il amène son adversaire à commettre une faute irrévocable : penalty et occasion pour l’équipe de Mourinho de s’échapper.

Derlei ne tremble point et propulse son équipe vers les étoiles. Les 30 dernières minutes s’écoulent entre une défense rigoureuse, des éclairs individuels (Deco se démarquant), une chance presque incroyable (une nouvelle expulsion du camp adverse, Naybet à la 70e), et une grande prise d’initiative, illustrant le mérite de José Mourinho et des siens. Cette séquence en est un parfait exemple :

À la 74e minute, Porto mène 1-0, jouant à 11 contre 10. Alors que l’équipe en supériorité pourrait se contenter d’attendre, Derlei, Deco et Maniche choisissent de presser leurs adversaires très haut.

Manuel Pablo tente de trouver une solution verticale pour progresser, mais fait face à la pression de Deco.

Les options courtes sont coupées et Pablo doit chercher un joueur en soutien au loin.

Nuno Valente ne craint pas de surgir devant le joueur de La Corogne et sa prise d’initiative est validée par une récupération élevée du ballon, permettant aux Portugais de garder le ballon dans ce moment critique du match.

Étiqueter José Mourinho comme le maître de « l’école du béton » serait réducteur. La rétrospective le prouve. Avec une équipe de grande qualité, il se révèle capable d’imposer son style tout en s’adaptant aux circonstances. Si l’on ajoute une pincée de réussite presque insolente, il devient évident que tout était en place pour que le génie de Mourinho soit émergent. Sa posture proactive lui assure d’accéder à la finale contre Monaco, marquant un aboutissement de son œuvre (s’en souvient-il encore ?).

Le dernier coup de pinceau : une masterclass collective dans la finale des outsiders

Dans cette ultime épreuve, José Mourinho fait face à un coach au moins aussi ambitieux et encore plus jeune que lui : Didier Deschamps, âgé de 35 ans à l’époque.

Le 26 mai 2004, à Gelsenkirchen, les deux futurs grands noms du coaching se rencontrent en quête du Graal.

José Mourinho aligne son équipe type, remplaçant Alenitchev, un de ses habituels couteaux suisses, par Pedro Mendes, tout aussi polyvalent. On note également le retour définitif de Derlei, laissant Mac Carthy sur le banc.

L’adversaire

Le contenu de ce match est une magnifique synthèse du modèle de jeu élaboré par Mourinho. Face à une équipe monégasque entreprenante et redoutable, c’est l’exécution quasi parfaite de tout ce qui a été travaillé qui leur permet de triompher largement.

Les sorties de balle sont toujours aussi raffinées :

Le FC Porto récupère le ballon dans son camp, et face à la pression de trois adversaires, cherche des relais au sol sereinement.

Dans cette sortie, Maniche laisse passer le ballon pour Deco qui, d’une touche, retrouve Maniche face à son camp.

Les Portugais, dẫn d’un but en finale de Ligue des champions, tentent de sortir le ballon par le centre, dans une zone où la moindre erreur technique peut se transformer en punitive. Les joueurs de Mourinho restent fidèles à leur philosophie, réalisant un « une-deux » d’une beauté rare.

Un véritable « toro » s’opère sur cette séquence : Deco renvoie vers Carvalho, qui mène bien le ballon pour défaire la première ligne défensive.

Le décalage se concrétise alors : Carvalho réussit à trouver Carlos Alberto entre les lignes, qui relance, continuant à faire courir le bloc adverse, tout en laissant ses coéquipiers de l’autre côté pour créer une future occasion. L’option retenue ici est la conservation.

Les vedettes offensives, Deco et Carlos Alberto, produisent une prestation d’un niveau exceptionnel, se distinguant sur des attaques placées, mais aussi à la finition sur le premier but inscrit par Deco et le second pour Carlos Alberto.

Ces deux joueurs ont guidé l’équipe lors des matchs cruciaux, grâce à leur calme et technique permettant de ne jamais se laisser submerger, même face à une opposition de haut niveau.

Dans cette finale, nous voyons de l’exploitation des couloirs et des combinaisons qui ont fait mal à tous leurs adversaires pendant le tournoi.

Du côté droit, Paulo Ferreira gère le ballon, cherchant un relais, tandis que Pedro Mendes s’engage comme prévu, amorçant une projection vers le côté.

Avec le soutien de Derlei, la triangulation se crée, menant à une occasion de but. La passe de Paulo Ferreira atteint Derlei qui, en une touche, dévie pour Pedro Mendes, lancé derrière la défense.

En défense, les principes macro-tactiques développés par Mourinho varient entre pressing et défense en bloc médian :

Monaco contrôle le ballon à droite. Les joueurs portugais s’efforcent de les empêcher de progresser. Carlos Alberto fait l’effort de harceler le joueur en possession tandis que Maniche, plus haut, redescend pour couper les solutions rapides.

Le bloc portugais coulisse, tentant de créer une supériorité numéraire avec sept joueurs, contre six monégasques présents dans l’action. Les joueurs portugais les plus proches sont dans le duel et tentent d’encercler leurs adversaires avec l’appui de la touche.

Finalement, Maniche récupère le ballon et permet une possible transition offensive pour les Dragons.

Cette finale souligne également l’objectif défensif bien travaillé par l’équipe de Mourinho : s’aligner au mieux pour jouer le hors-jeu et avantager l’attaque adverse. Dans les 10 premières minutes de la finale, les attaquants de Monaco se retrouvent hors jeu à trois reprises consécutives. Le bloc portugais cherche à rester compacter, évitant d’être entraîné vers l’arrière alors que Monaco cherche à exploiter la profondeur. Ce principe de jeu est d’autant plus pertinent avec Vitor Baia dans les buts, capable de rattraper quelques erreurs.

Ricardo Carvalho met en difficulté ses coéquipiers à cause d’une faute de concentration, provoquant un retard d’alignement. Zikos profite de la situation pour servir Giuly dans la profondeur.

Cependant, la défense portugaise peut compter sur Baia. Il sort de ses buts pour intercepter le ballon des pieds de Giuly avec un tacle parfait.

Fiabilité et expérience, voilà deux mots qui résument Baia. Il a côtoyé le plus haut niveau au cours de ses deux saisons avec le FC Barcelone entre 1996 et 1998. Son jeu est d’une pureté extrême, l’efficacité étant son unique préoccupation : ses prises de balle sont soignées, son jeu au pied très correct pour un gardien du début des années 2000, et il combine courage et rapidité pour sortir au loin lorsqu’il faut. En outre, ce gardien se distingue par sa maîtrise émotionnelle impressionnante. Quelles que soient les circonstances, il demeure imperturbable, sans aucune frustration, agitation ou panique. Sa capacité de concentration durant le match est remarquable.

Enfin, le FC Porto a prouvé une nette supériorité dans les phases de transition défensive-offensive. Le deuxième et le troisième but de ce match en sont des exemples parlants :

Monaco avance pour revenir au score, et lors d’une attaque, Pedro Mendes effectue un tacle sur Morientes, jugé bon par l’arbitre. Alors que l’alignement portugais est excellent, les joueurs ne veulent pas reculer malgré l’espace qu’ils laissent derrière eux, ce tacle déclenche la transition.

Alors que Morientes est à terre, Jorge Costa passe le ballon à Deco, seul entre les lignes. Cette passe rapide suite à la perte du ballon crée un temps d’avance, crucial au cours de cette transition. Six joueurs de l’ASM tentent de se replier.

Deco élimine son adversaire grâce à sa conduite de balle et résiste au retour. Cela lui permet d’ouvrir à gauche pour ses coéquipiers qui attaquent l’espace. Leurs coéquipiers monégasques semblent trop éloignés pour aider les trois défenseurs. La passe initiale en une touche rend le repli encore plus difficile, offrant un espace considérable.

Alenitchev, entré en cours de match, reçoit le ballon dans la surface, essayant de gérer ce 3 contre 3 de la meilleure des manières. Tandis que les trois défenseurs de Monaco paraissent obsédés par le ballon, ne regardant pas autour d’eux, l’international russe est parfaitement secondé par Deco dans son choix. Un appel, délicatement fait, lui permet de se retrouver idéalement positionné pour achever face à Flavio Roma. Cela fait 2-0, et Monaco ne reviendra plus.

Comme symbole de l’implication collective harmonieuse derrière son entraîneur, c’est Alenitchev, acteur crucial de cette campagne, mais remplaçant pour la finale, qui offre le troisième but sur une séquence similaire. Abordons ce match sans oublier la fortune presque insolente qui accompagne José Mourinho. Comme lors des tours précédents, la chance semble être de son côté : Giuly, élément clé de l’animation de Deschamps, se blesse dès le début du match. Monaco, malgré un football de qualité en finale, n’aura pu s’exprimer que 25 minutes avec son équipe type.

Conclusion

S’il devait subsister une leçon du parcours de José Mourinho en Ligue des champions 2003-2004, ce serait que le chemin d’un entraîneur est à évaluer dans toute sa complexité, sur le long terme, et sans se laisser emporter par le tourbillon médiatique et les petites phrases saisonnières. De nos jours, presque unanimement, Mourinho est catalogué comme un coach « négatif » et « conservateur », mais l’analyse du modèle de jeu de son FC Porto démontre qu’il n’en a pas toujours été ainsi. Ce coach portugais est avant tout un génie en micro et macro-tactique, capable de faire briller les atouts de son équipe comme peu savent le faire. Avant d’aller à Chelsea en 2004, un club qui partage son ambition dévorante, il semble être le profil idéal : capable de proposer un foot offensif, tout en s’adaptant à l’adversaire et au contexte, excellent communicant, manager hors pair, la gloire et les trophées semblaient lui être promis pour l’éternité. En matière de trophées, il ne décevra pas les clubs qu’il a gérés, mais on peut percevoir qu’il abandonne une part de son âme et de son identité active à chaque club qu’il quitte. Au point qu’à Manchester United, Mourinho semble devenir une caricature de lui-même, rongé par l’ego et la vanité. Dans un univers footballistique où la compétition est intense, personne n’est à l’abri. Même José Mourinho, l’homme aux 25 trophées, peut plonger dans l’oubli, ne retrouvant plus le haut niveau. Dans un tel contexte, le chemin vers la rédemption pourrait bien passer par un retour en arrière, là d’où tout a commencé, là où l’authenticité était encore vivante… José Mourinho peut-il redevenir un coach central ?