Un football séduisant et spectaculaire
« J’ai déjà affirmé que, pour moi, le football devait avant tout charmer le public. Gagner n’est pas tout. (…) Quels efforts devrais-tu fournir pour gagner et de quelle manière ? Il est important d’impliquer les supporters, pour qui le club est une véritable partie de leur existence. » Ne pas aborder le football protagoniste sans évoquer le travail de Johan Cruyff en tant qu’entraîneur serait une erreur. Si aujourd’hui, certains passionnés se contentent de résultats, son discours était marginal au sein du football européen des années 1990. Néanmoins, ses idées ont atteint des distances considérables, jusqu’en Colombie, où Francisco Maturana reconnaît l’influence néerlandaise sur sa vision du football. Surtout, le travail de Cruyff a permis d’équilibrer le débat entre les partisans du « pragmatisme » et ceux du « beau jeu idéaliste ». Johan Cruyff, suivi par Guardiola, a magistralement associé jeu constructif, vecteur d’émotions, avec la collection de titres. Son action s’inscrit dans un immense club que lui, et son équipe, ont su reconstruire. Ce modèle de jeu est une source d’inspiration incroyable pour tous les éducateurs et passionnés. C’est pourquoi BeautyFootball vous propose une rétrospective tactique d’un projet de jeu d’une richesse inégalée.
Les fondations d’un projet collectif ambitieux
En utilisant divers articles et ses Mémoires publiées en France chez Solar, on peut dégager des principes de jeu et de management essentiels à sa vision. Pour Johan, le football est davantage une émotion : « Mon objectif n’est pas d’empêcher l’équipe adverse de jouer. Je ne veux pas m’ennuyer sur le banc. En tant qu’entraîneur, je m’efforce de tendre vers un football parfait. Les résultats suivront alors d’eux-mêmes. » Son style de jeu est axé sur l’attaque, mais sa vision est déjà globale : « Je suis un fervent adepte de l’attaque. Mais pour cela, il faut savoir défendre le plus haut possible dans le camp adverse. »
De plus, il accorde une importance capitale à la gestion de l’espace de jeu. L’espace est fondamental et chaque mètre compte, que ce soit en attaque ou en défense. Il déclare : « Le porteur du ballon doit toujours avoir un coéquipier devant et un autre à côté de lui. L’espace doit être limité à dix mètres pour éviter les pertes de balle. » Jouer offensif, c’est occuper tout l’espace entre le rond central sur son terrain et la surface de réparation adverse. Si l’on maîtrise ces distances, les joueurs peuvent aisément retrouver leurs places et s’assurer d’une couverture défensive adéquate. L’immobilisme, pour Johan, est inacceptable : « Cela me rend fou de voir des joueurs statiques sur le terrain. Cela ne se pardonne pas. Il faut que tous les joueurs soient en mouvement en possession du ballon, en évaluant la distance. Ce n’est pas tant le nombre de mètres parcourus qui compte, mais comment on les parcourt. »
Une composition d’équipe et un style de jeu innovants
En amont, il est essentiel de retracer cette composition d’équipe et le contexte de cette analyse. Johan Cruyff introduit un turnover considérable et il est indéniable que Michael Laudrup joue un rôle crucial dans cette équipe. Malgré un effectif pas si vaste, de nombreux joueurs contribuent à la conquête des titres de la saison 1993-1994 : Eusebio Sacristan, Juan Carlos, Estebaranz, Begiristain, etc. Ce 3-4-3 est légèrement asymétrique avec Stoichkov, qui évolue librement entre la ligne de touche et la zone de Romario, tandis que l’autre flanc est plus discipliné. Les permutations et les changements de rôle sont fréquents, donnant une fluidité remarquable à l’équipe.
Il serait réducteur d’analyser la profondeur d’un travail débuté dès 1988 en se concentrant uniquement sur 1993-1994, et sur un nombre restreint de matchs. Je vous incite à visionner un maximum de matchs, tant leur richesse est manifeste.
Un chef-d’œuvre en phase offensive
La participation collective dans la phase offensive étant essentielle, il est utile d’examiner chaque ligne. Zubizarreta, le gardien, se distingue par une attitude atypique dans les années 90. Son but est de trouver rapidement un joueur libre. Il privilégie souvent le jeu court, car sa défense à trois lui confère des options. Peu enclin à rester collé à sa ligne, il prend des initiatives et choisit, lorsqu’il le faut, d’intervenir loin de sa zone. Le but commun est clair : ne pas gaspiller le ballon une fois en possession.
Un pressing défensif novateur
« L’équipe doit savoir quoi faire en cas de perte de balle. Cela dépasse la technique, c’est une question de mentalité à inculquer dès la formation. … défendre, c’est être bien positionné. » Les Blaugranas, lorsqu’ils attaquent, cherchent à créer des supériorités dans certaines zones, afin de récupérer la balle aussi vite que possible.
Ce comportement défensif est peu fréquent dans les années 90. Le terme de « pressing » porte de multiples significations aujourd’hui, mais il est sans doute plus juste de parler de « harcèlement ». Ce harcèlement n’est pas systématique et collectif comme on le voit dans les équipes contemporaines. Il se déclenche souvent sur des passes arrière ou horizontales. L’objectif est de provoquer une erreur, d’orienter l’adversaire, et de permettre aux partenaires de se replacer en zone.
Conclusion
La véritable question demeure : les grands joueurs façonnent-ils les grands entraîneurs ? Et inversement, comment saisir l’influence d’un entraîneur sur ses athlètes au plus haut niveau ? Toutes ces réflexions soulignent l’harmonie collective qui naît entre des individus exceptionnels. Johan Cruyff, tout en ayant conçu un modèle de jeu inspirant, nous incite à écouter, observer, et tirer profit de cette fascinante synergie. Comme il le dit si bien : « Le coach est la seule personne obligée de voir tous les matchs de son équipe. Autant en profiter, non ? »

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Quand j’ai un moment, j’écris tranquillement mes impressions et mes petites analyses.
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