En 2023, la Ligue 1 est-elle encore ce championnat, ce « paradis des vainqueurs » où l’on accorde uniquement « le mérite à ceux qui gagnent, parce qu’ils ont été plus forts que les autres » (1) ? La Ligue 1 reste-t-elle dominée par les partisans qui répètent inlassablement « Ça me va si on n’est pas très bien dans le jeu et qu’on est capables de gagner » (2) ou « si vous voulez du spectacle, dirigez-vous vers le cirque ! » (3) ? Didier Deschamps est-il toujours considéré comme « l’élu », représentant parfait de l’entraîneur français moderne, incarnant à la fois l’aboutissement de la compétence footballistique et la neutralité d’une vision du football éloignée des émotions qu’il procure aux spectateurs ? Si ces interrogations auraient pu recevoir une réponse positive indiscutable il y a 10-15 ans, l’incertitude règne actuellement. Bien que le football mondial contemporain s’articule autour d’un fétichisme de la compétition et d’une idolâtrie du résultat, rappelons-nous que ce sport s’est historiquement construit (4) comme un jeu, une activité libre, accessible et sans classement.
Une évolution de la culture footballistique
Dans ce contexte d’ambivalence, de quelle manière l’entraîneur de Ligue 1 peut-il s’affirmer aujourd’hui ? Au sein de cette lutte culturelle et idéologique sur le plan européen et mondial, la France évolue à travers son championnat d’élite. De nouveaux types d’entraîneurs (français ou non) émergent et transforment lentement notre culture footballistique : des réflexions partagées et transparentes avec l’observateur sur le jeu, l’importance de l’esthétique dans le sport, la critique de l’attentisme, et un modèle de jeu axé sur le protagonisme, quels que soient les moyens financiers du club, toutes ces idées se frayent un chemin dans nos discussions footballistiques.
Analyse de l’approche des entraîneurs
Il s’agit ici d’examiner ce processus à travers l’étude de trois entraîneurs de Ligue 1. Les questions qui se posent sont les suivantes : comment Franck Haise, Régis Le Bris et Paulo Fonseca tentent-ils de défendre un idéal de jeu « protagoniste » face au Paris Saint-Germain, l’équipe la plus forte du championnat ? Quelles sont les caractéristiques de ces modèles de jeu sur le terrain ?
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Remarque au lecteur : Cette analyse se base sur un échantillon de trois matchs distincts : les affrontements de Lens, Lille et Lorient contre le Paris Saint-Germain en Ligue 2022/2023. Cela dit, et malgré les idées soutenues ici, cet article ne prétend pas à l’exhaustivité ni à la vérité absolue. Les opinions présentées n’engagent que l’auteur. Enfin, les citations directes des entraîneurs n’auraient pas été possibles sans l’aide précieuse d’Alexandre Haddad, que l’on remercie ici. Crédits photo : iconsport. Les chiffres proviennent des plateformes whoscored.com, Opta et Fotmob.com.
Alors qu’il se consacre à la préparation pour la saison à venir, en travaillant sur la composition de l’effectif et réalisant des entretiens individuels, l’entraîneur de l’équipe principale et professionnelle du CSP Limoges, Mehdy Mary, a pris le temps de partager ses réflexions. Nous avons abordé des sujets variés, allant des connexions entre le basketball et le football, à la formation, sans oublier la méthodologie d’entraînement et les aspects tactiques.
Mehdy Mary et sa vision du sport
Beautyfootball vous offre un aperçu de la pensée fascinante de Mehdy Mary.
« Le football est un art et l’art n’a pas de patrie. » Cette magnifique citation tirée de Football et formation : une certaine idée du jeu établit d’emblée le ton de cet ouvrage. Pendant plus de cent pages, l’auteur s’efforce d’élever le football à sa quintessence et d’offrir, comme un précieux présent, aux éducateurs et passionnés, une analyse approfondie de notre football national. Voici une analyse.
Un guide pour les éducateurs
Il est important de le préciser : ce livre constitue une véritable opportunité pour tous les éducateurs ambitieux qui partagent une vision du jeu. Un bon éducateur ne repose pas sur des certitudes, mais sur des convictions. Tout dans cet ouvrage incite à enrichir notre réflexion sur la quête du « beau jeu ». Pour Thierry Guillou, le « beau jeu » — c’est-à-dire un football réfléchi et respectueux des spectateurs — n’est pas un simple mirage. Contrairement aux certitudes des « pragmatiques », il est possible d’en définir les contours. L’auteur utilise un langage accessible pour éclairer des termes souvent déformés, comme la différence entre l’erreur et l’échec. Il aborde également la notion de vitesse, qui ne se limite pas à la rapidité physique, mais intègre également la vitesse mentale et gestuelle. Ainsi, chaque éducateur disposé à ouvrir son esprit pourra avancer sur des aspects précis de la pédagogie.
Un constat parfois mitigé
Après avoir posé les définitions, Guillou dresse un constat parfois amer sur certaines insuffisances de notre football national : de nombreux dirigeants de clubs manquent de vision formée au-delà de la victoire immédiate, le football de rue est en déclin, trop de centres de formation existent, et les éducateurs y sont souvent plus carriéristes que pédagogues. La financiarisation excessive de notre football constitue un frein à la progression des clubs et des jeunes.
Des lueurs d’espoir
Cependant, tout n’est pas sombre. Notons la présence d’une nouvelle génération de talents internationaux dans notre sélection nationale. En s’appuyant sur des figures respectées du milieu (Arsène Wenger, Jean Claude Suaudeau, Jean Marc Guillou, Christian Gourcuff, Raynald Denoueix, etc.), ainsi que sur des citations éclairantes, il démontre qu’il est possible de se perfectionner dans la formation des jeunes et d’adopter des approches différentes. Il est crucial de renoncer à une vision réductrice du football centrée sur « gagner des duels », de sortir des schémas conventionnels, et de développer l’intelligence de jeu et l’intelligence émotionnelle à travers nos exercices, tant sur la phase avec le ballon que sans. Car « de la qualité de la récupération dépend la qualité de l’attaque ». Tous ces principes sont finement analysés pour le plus grand bénéfice de l’éducateur.
Un message engagé
À l’issue de cette captivante et enrichissante lecture, il apparaît clairement que Thierry Guillou ne se veut pas dogmatique. Comme il le précise : « à l’image de la couverture du livre, tout n’est pas noir ou blanc ». Toutefois, il exprime clairement ses convictions. Pourquoi ? Parce que, comme il le dit, « si vous ne vous investissez pas d’une manière ou d’une autre pour défendre un idéal, c’est que vous n’y croyez pas pleinement ! »
Épisode 2 : comment Mourinho exila les ambitions françaises
En 2003-2004, la prestigieuse Ligue des champions semble s’éloigner du Portugal, se tournant plutôt vers l’Italie, l’Angleterre ou l’Espagne, où les clubs établis et garnis d’étoiles se disputent le titre. L’année précédente, l’A.C. Milan avait dû passer par une séance de tirs aux buts pour triompher de la Juventus. Toutefois, si cette coupe avait prêté attention à sa petite sœur, elle aurait aperçu le FC Porto de Mourinho, victorieux de la Coupe de l’UEFA, marquant ainsi le début d’une ascension sur la scène européenne et mondiale. C’est la saison 2003-2004, et le parcours spectaculaire du FC Porto sous la direction de José Mourinho en Ligue des champions met en lumière le talent de ce coach. Dans le tourbillon de l’actualité footballistique, le passé semble souvent oublié. En dehors des souvenirs nostalgiques des supporters déçus, la notoriété des entraîneurs se construit et se détruit chaque jour. C’est pourquoi Beautyfootball décide de revenir sur le premier grand triomphe de José Mourinho avec « son » FC Porto, une équipe patiemment construite dont l’ADN et le style de jeu sont éloignés des clichés qui lui sont souvent associés. Après sa magnifique victoire face à Manchester United, José Mourinho réussit à écarter les rivaux français de la conquête du titre ultime. Voici donc l’analyse tactique de cette double confrontation.
N.B : si c’est votre première visite sur le site, ne manquez pas de lire mon « idée clé », elle est cruciale pour comprendre l’ensemble du contenu. Vous ne regretterez pas !
Composition et animation
Note au lecteur : Étant donné que nous analysons des matchs assez anciens, la qualité des vidéos et, par conséquent, des images sélectionnées peut ne pas toujours être optimale. Merci de votre compréhension. Un grand merci à footballia.net, sans qui cela ne serait pas possible.
L’adversaire
Attaques placées millimétrées, transitions chirurgicales et joueurs de classe : des détails qui font la différence
Mourinho adopte un plan de jeu relativement classique pour un match à domicile, mais pas toujours facile à mettre en œuvre sur le terrain. Son but est de mettre à mal le bloc lyonnais à travers des attaques placées, tout en sachant que développer toutes les transitions entre phases défensives et offensives offrira d’énormes occasions, compte tenu des lacunes positionnelles de la défense française, notamment avec Malouda, peu familier à ce poste.
Paul Le Guen, quant à lui, souhaite mettre en place un football axé sur les transitions, alternant entre un bloc médian défensif et des phases de pressing haut, en cherchant à bloquer Maniche.
Rien de surprenant ou de révolutionnaire à ce sujet, d’autant plus que c’est dans ce contexte que la science du détail et la qualité individuelle des joueurs changent le cours du match.
« Ce qui faisait la différence, c’est que chacun connaissait les mouvements de l’autre par cœur. Chaque joueur savait ce que l’autre allait faire, et à quel moment. (…) Moi, avec Deco… Parfois, on ne se parlait même pas sur le terrain. Un simple regard, un clin d’œil, suffisait pour comprendre l’action à venir. » Ces propos de Maniche pour So Foot soulignent un aspect fondamental du football de haut niveau : la proximité entre les joueurs, les affinités et les liens techniques créés, offrant ainsi un temps d’avance dans toutes les séquences de jeu. À ce niveau-là, où chaque seconde compte, ces détails ne sont pas anodins. D’ailleurs, lors de ce quart de finale, la complicité des joueurs dans toutes les phases de jeu est frappante pour le spectateur.
Cette séquence de sortie de balle au sol illustre bien les propos de Maniche :
Maniche reçoit le ballon en se positionnant en « regista », proche de ses défenseurs centraux. Un joueur lyonnais commence à cadrer.
Maniche, avec son intelligence et sa technique, fixe deux adversaires avant de passer à son défenseur central, qui a déjà compris de faire avancer le jeu pour déjouer la première ligne défensive.
Alors qu’il subit la pression de Luyindula, Emanuel trouve une superbe passe verticale pour Alenitchev entre les lignes, illustrant parfaitement la prise d’initiative de ce dernier.
Contrairement au match aller contre Manchester United, le trio lyonnais a compris dès le début qu’il ne fallait pas laisser Maniche organiser le jeu. Cependant, la force du FC Porto réside aussi dans sa complémentarité et sa qualité technique globale. Ce que l’on constate ici avec Emanuel qui apporte un soutien précieux à Maniche.
Le début de match du FC Porto est également facilité par cette lecture du plan défensif lyonnais : Mourinho avait prévu un marquage serré, obligeant sa charnière à prendre plus de responsabilités dans la relance, ce que Emanuel, défenseur souvent remplaçant, applique avec enthousiasme.
Avec son dépassement de fonction, Emanuel avance sur le terrain, se trouvant en position de faire une passe, bien que cela ne produise pas l’effet escompté.
Comme observé dans les rencontres précédentes, Costinha se retire fréquemment pour laisser de l’espace à Maniche ou Deco, qui préfèrent décrocher.
Le match commence avec une grande intensité. Porto, clairement l’équipe dominante, tente de désorganiser le bloc lyonnais à travers plusieurs offensives, bien que sans succès immédiat.
Le FC Porto utilise efficacement la largeur du terrain. Maniche passe à Paulo Ferreira, qui, avec Alenitchev, se rapproche de la ligne pour offrir une solution. Pendant ce temps, le bloc lyonnais se déplace, permettant à Ferreira de servir verticalement et éliminer ces deux attaquants.
Les Portugais démontrent leur maîtrise du jeu sur les côtés et savent lire les espaces. Alenitchev identifie immédiatement l’espace à exploiter, bien que ses passes soient compliquées par la défense lyonnaise. Son jeu astucieux avec Mac Carthy permet d’approcher le but adverse.
Dans le système de Mourinho, l’utilisation des ailes est cruciale, surtout compte tenu des caractéristiques des joueurs. Les capacités de projection des relayeurs et le rythme des latéraux s’adaptent parfaitement à cette approche. Le jeu des Dragons penche nettement à droite au début du match.
Alors que l’Olympique Lyonnais essaie de verrouiller l’axe pour couper la relation entre Deco et les attaquants, il mésestime leur potentiel à créer le jeu sur les côtés, encore visible contre Manchester United. Et si jamais l’axe s’ouvre, les Lusitaniens n’hésitent pas à en profiter.
Les joueurs français laissent leurs adversaires jouer en bénéficiant souvent des faiblesses lyonnaises. Deco, bien présent, en profite pour se placer entre les lignes et se retrouve rapidement en bonne position.
Le danger est palpable pour la défense lyonnaise qui accumule les erreurs. Deco, incisif, passe rapidement à Mac Carthy, qui fait une course en profondeur mais échoue à concrétiser l’occasion.
Les premières quinze minutes montrent que les Portugais peuvent représenter une menace à tout moment. Défensivement, ils ont une excellente lecture du jeu lyonnais, interceptant les passes aériennes et dominer les seconds ballons.
Le bloc du FC Porto se déplace de manière à verrouiller l’axe et à forcer les Lyonnais sur les côtés. Lorsqu’ils tentent des sorties de balles, les erreurs lyonnaises augmentent les opportunités pour Porto.
Bien qu’ils soient mis sous pression, les défenseurs portais restent solides. Les premières tentatives de Lyon sont inefficaces et ne mettent pas en péril le bloc lisboète.
Le match retour ou la confirmation de la supériorité portugaise dans toutes les phases de jeu
Pour le match retour, la composition lyonnaise a été modifiée. Berthod et Dhorasso remplacent Deflandre et Govou. Le staff lyonnais tente un nouveau schéma, un 3-5-2 peu conventionnel, tandis que Mourinho maintient sa formation de 4-4-2 en diamant avec tous ses titulaires.
José Mourinho sait que l’O.L va certainement presser pour compenser son retard. Son objectif est clair : marquer rapidement pour imposer son jeu. Paul Le Guen, de son côté, veut que son équipe soit proactive et augmente la cadence pour mettre la défense portugaise à l’épreuve.
Les lacunes physiques observées lors du premier match chez Porto laissent envisager une stratégie de pressing moins agressive de la part des Portugais.
Le FC Porto, qui a su gérer son rythme de jeu, prend l’ascendant dès la 5ème minute et semble balayer l’O.L de la compétition.
Un défenseur lyonnais fixe trois adversaires pour faire une passe verticale, mais Carvalho lisent le jeu et intercepte efficacement. Cette transition rapide est exploitée par Deco pour changer la donne en faveur de Porto.
La connexion entre Deco et Maniche, couplée à une qualité technique supérieure, permet aux Portugais de prendre l’avantage. Eden se retrouve seul face à Coupet et réussit une frappe remarquable.
À chaque séquence de jeu, les Dragons affichent une cohésion qui impressionne le spectateur, débutant ainsi avec un bloc retranché, permettant aux Lyonnais de prendre des risques.
Malgré quelques points noirs comme la perte de la balle ou le déchet technique, le FC Porto démontre sa maîtrise tout au long de la rencontre, créant des occasions de but à la vitesse de l’éclair.
En somme, cette double confrontation révèle la domination indiscutable du FC Porto. Avec une technique raffinée et un plan de jeu bien orchestré, Mourinho voit son équipe se qualifier pour les demi-finales de la Ligue des champions, tandis que la surprise se profile à l’horizon avec le Deportivo La Corogne comme prochain adversaire. À suivre sur BeautyFootball !
Alors qu’il est en pleine préparation pour la prochaine saison, incluant la constitution de l’effectif et des entretiens individuels, l’entraîneur principal de l’équipe professionnelle du CSP Limoges a pris le temps de discuter avec nous des relations entre le basketball et le football, de la formation, ainsi que de la méthodologie d’entraînement et de la tactique. Son nom : Mehdy Mary. Beautyfootball vous invite à découvrir une réflexion captivante.
Plongez dans l’expérience de Raynald Denoueix à la Real Sociedad, où il bâtit une équipe fondée sur l’intelligence collective pour rivaliser au plus haut niveau.